Je vous en fais part...A méditer...
(Abbé Bougard 2013)
Je dois vous
avouer que lorsqu’Armand Bricq, votre nouveau Président du Conseil de Fabrique,
m’a demandé de dire quelques mots à l’occasion de cette cérémonie, j’ai été
pour le moins dubitatif.
Car que dire
de l’Abbé Alphonse Bougard que l’on ne sache déjà ?
Et puis, certains événements récents et répétitifs
m’ont interpellé. Et je me suis interrogé. Je me suis demandé ce que j’aurais
fait si, au lieu de naître au milieu de la guerre, j’étais né vingt ans plus
tôt. Certains d’entre vous se sont peut-être déjà posé la question. Aurais-je
eu, comme le vicaire Bougard, le courage de défendre mes opinions et de les défendre jusqu’au bout ? Car
c’est peut-être cela que l’on n’a pas dit assez. Et tous les Résistants que
j’ai connus, à commencer par l’ancien commissaire Druine ou l’ancien échevin
Emile Clersy, me l’ont confirmé à l’époque. L’abbé Bougard se savait menacé. Il
était sur la liste noire. Ses activités étaient connues et il n’a jamais cessé,
même ici, à l’intérieur de cette église, de vilipender ceux qui se mettaient au
service de l’occupant. Il savait qu’un jour ou l’autre, il serait arrêté. Mais
il n’a jamais voulu fuir, il n’a jamais voulu se cacher, il n’a jamais voulu
faire attention. Il était prêt pour le sacrifice suprême parce qu’il était
persuadé que ce sacrifice ne serait pas inutile.
Hasard des
dates ? Au moment où nous commémorons le septantième anniversaire de son
arrestation, on vient d’évoquer les 80 ans de la prise pouvoir d’Hitler, en
janvier 1933. Et il est bon de se rappeler un certain nombre de faits. Il faut
se rappeler qu’Hitler a prêté serment de chancelier en redingote et chapeau
haut-de-forme, et qu’on l’appelait Monsieur Hitler. Qu’il est arrivé au pouvoir
d’une manière tout à fait légale, après des élections, et que le parti
national-socialiste était loin d’être majoritaire dans le gouvernement de
coalition. Mais le vernis a très vite craqué, avec les conséquences que nous
connaissons.
Faut-il en
tirer des leçons ? Certains en ont voulu au Roi d’avoir pointé du doigt
quelques attitudes anormales. A-t-il eu tort ? Quand on voit un parti
prendre d’assaut un hôtel de ville au soir des élections, quand on voit qu’un
bourgmestre fait enlever les portraits royaux de la salle du Conseil et que
l’on ne fera flotter le drapeau belge qu’aux jours d’obligation, qu’ailleurs on
interdit de porter des vêtements de couleur arc-en-ciel parce qu’ils pourraient
dénoter une tendance sexuelle déterminée, je crois qu’au contraire, le roi a bien
joué son rôle.
Bien sûr, le
spectre de la guerre est loin. L’Union européenne a au moins ceci à son actif :
depuis 1945, nous n’avons plus connu de conflit armé. Mais des guerres, nous en
avons connues aux portes de l’Europe : l’ancienne Yougoslavie, l’Albanie
et le Kosovo, ce n’est pas si loin, ni dans le temps, ni dans l’espace. Et nous
voyons se développer dans tous nos pays, des partis nationalistes, des partis
populistes qui rejettent peu ou prou la démocratie, qui veulent restreindre les
libertés individuelles, qui dressent les populations les unes contre les autres
en fonction de richesse, de développement, d’origine, de religion, de culture,
que sais-je ?
Et en-dehors
de l’Europe, je ne prendrai qu’un exemple. Qu’est devenu l’immense espoir
qu’avait fait naître ce que l’on a appelé le « Printemps arabe » ?
Quand on voit ce qui se passe aujourd’hui en Tunisie ou en Egypte, où le peuple
se révolte à nouveau pour essayer de se réapproprier sa révolution, quand on
voit la joie de la population de Tombouctou libérée de l’emprise islamiste, on
doit bien se dire que les signes alarmants sont nombreux. Ici et ailleurs.
Je crois que
pour que le sacrifice de l’Abbé Bougard et, à travers lui, de milliers et de
milliers d’autres, ne devienne pas septante ans après un sacrifice inutile, nous
devons être attentifs, je dirais même vigilants, et responsables. Les
générations qui nous suivent ne nous le pardonneraient pas. Soyons, à notre
tour, des Résistants.
Michel
Meurée.
(10.02.2013)
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